Elle revient ! Qui ? La consigne des contenants dont les plus âgés se souviennent peut-être l’avoir connue enfant. Dans le cadre de la loi Agec, le gouvernement souhaite en effet la généraliser d’ici 2024 afin de mettre fin à l’emballage en plastique à usage unique.
Dans la France des années 60, rapporter à l’épicerie sa bouteille de lait, celle pour le vin et sa boîte à œufs pour les remplir à nouveau étaient l’évidence : ils étaient consignés ! Et puis, au fil des décennies, l’être humain se transformait en homo detritus*, selon le terme employé par le chercheur Baptiste Monsaingeon : jeter, à l’ère du tout consommable, devenait un signe de modernité. Jusqu’à la disparition définitive de la consigne en 1992 avec la loi sur la responsabilité élargie du producteur, le principe du pollueur-payeur.
Le gouvernement souhaite le retour de la consigne, dans le cadre de la lutte contre les emballages à usage unique.
Une exception notable en France est à relever : en Alsace, la pratique a perduré notamment chez les brasseurs et cafetiers puis a été réintroduite dans les grandes surfaces. Dès 2018, les producteurs constataient ainsi une progression des ventes de produits consignés. Aujourd’hui, le gouvernement souhaite le retour de la consigne, dans le cadre de la lutte contre les emballages à usage unique, tout comme les associations France Nature Environnement, Surfrider Foundation et Zero Waste France qui militent en faveur de la consigne pour réemploi.
Ne plus jeter, réutiliser
C’est dans ce contexte que, depuis le 1er janvier 2023, tous les établissements de restauration servant plus de 20 couverts en simultané doivent employer de la vaisselle réutilisable pour les repas et les boissons servis sur place. Une mesure qui, selon l’Ademe, permettra d’éviter de jeter 130 000 tonnes de gobelets et d’emballages de repas à usage unique. En dehors de la restauration rapide, la plupart des acteurs du secteur utilisaient déjà de la « vraie » vaisselle. Mais, en restauration d’entreprise, quid de la vente à emporter lorsque l’on préfère déjeuner à son bureau ou hors du restaurant ? De la collation de 16h ? Du plat que l’on emporte chez soi pour le dîner ? Les restaurateurs s’adaptent avec en ligne de mire la fin de l’utilisation des contenants jetables d’ici le 31 décembre 2023.
Prêter et ne pas faire payer
Sodexo a ainsi choisi de construire une solution sur-mesure, accompagné par deux start-up, Bibak et Pyxo, spécialisées dans les systèmes de réemploi pour la restauration. « Nous avons mis au point un parcours digital adapté à nos offres et aux modes de consommation des convives », explique Pascale Eigho, chef de produit digital en charge des applications food. Si la consigne de base consiste à payer un supplément et à le récupérer lors du retour du contenant, Sodexo a choisi de ne pas faire payer le consommateur. Et d’opter ainsi pour la responsabilisation et la pédagogie. Chaque contenant possède un QR code scanné lors du passage en caisse et enregistré sur la carte du convive. Celui-ci a 14 jours pour le rapporter en le déposant dans les bacs de récupération qui scannent alors le QR code. En cas de non-retour, un montant sera prélevé sur la carte du convive. « Mais notre volonté est de ne pas débiter et que le plus de contenants possibles soient rapportés. C’est un parcours de prêt. ». Ce parcours est disponible sur deux applications SoHappy et Toqla. Plus de soixante sites utilisent actuellement de la vaisselle réemployable, 150 étant l’objectif fixé à fin décembre 2023. « Sur les sites équipés, le taux de retour est de 98 % », annonce Pascale Eigho. Un résultat qui confirme que la consigne séduit : selon un sondage Reloop France et Francophonie réalisé en mars 2023, près de 9 Français sur 10 se disaient favorables à sa réintroduction.
*Homo Detritus – Critique de la société du déchet de Baptiste Monsaingeon, Le Seuil, 2017.
**Source : Zero Waste France