le buffet d'une cantine

En finir avec le gaspillage alimentaire !

Publié le : 06/03/23
Temps de lecture : 5 min
  • Dans les cantines scolaires, près d’un tiers des plateaux finissent à la poubelle. Un chiffre qui nous fait bondir à l’heure de l’inflation et des défis environnementaux. Décryptage et analyse pour mettre un point final au gaspillage alimentaire dans nos cantines.

    « Premier secteur visé par une disposition anti-gaspillage dans la loi de transition écologique pour la croissance verte, dès 2015, la restauration collective est proactive. Il n’y a pratiquement plus de collectivités ou d’établissements qui n'ont pas abordé ce sujet sous quelque forme que ce soit », souligne Laurence Gouthière, chargée de la lutte contre le gaspillage alimentaire à l'ADEME (Agence de la transition écologique). Parmi les acteurs de la restauration collective, les cantines scolaires font même figure de bons élèves dans la lutte contre le gaspillage comparées aux secteurs hospitalier et des EHPAD, mais la marge de progression est bien réelle. En moyenne, 110 g par repas finissent à la poubelle. Rapportées au nombre d’élèves, les quantités perdues sont colossales. Alors, comment y remédier ? 

    Poser un diagnostic

    Première étape indispensable, le diagnostic.

     Au sein d'une même collectivité, entre l'école de tel quartier et de tel autre, nous n’allons pas aboutir au même constat. Il faut prendre ce temps-là et renouveler l’exercice tous les ans.

    Laurence Gouthière.

    De nombreux outils existent pour mener à bien ce chantier en autonomie ou avec l’aide d’un prestataire. Une fois le diagnostic réalisé, il est temps de réunir toutes les parties prenantes, de prendre ses responsabilités collectivement et de décider d’engager des mesures appropriées qui ne tarderont pas à faire leurs preuves. « À partir du moment où les équipes ont pris conscience et qu'elles font attention en cuisine, en distribution, en salle, il est possible de réduire facilement de 20 à 30 % le gaspillage alimentaire. Là où c'est plus compliqué et ambitieux, c’est d’atteindre 50 % de diminution car il faut alors changer des process bien installés, s’investir dans la durée et prendre en compte tous les petits détails qui font la différence », estime Laurence Gouthière, alors que la France s’est engagée à réduire de moitié le gaspillage alimentaire d’ici 2025 dans ce secteur. Un diagnostic hebdomadaire ou quotidien peut s’avérer alors intéressant.

    Engager une réflexion sur les menus

    Lors de la création des recettes, s’attaquer à la question du plat principal doit être une priorité. Pourquoi ? C'est là où il y a le plus fort enjeu économique et environnemental. « Environ 60 % de ce qui est jeté est lié au plat principal. Et dans ces 60 %, on a 40 % qui correspondent aux accompagnements : les légumes et les féculents. Puis 20 % qui représentent la partie protéine animale (viande, poisson, œuf) », expose Laurence Gouthière. Il faut prendre en compte plusieurs facteurs lors de la composition des repas dans une cantine scolaire : le goût des enfants, leur âge, mais aussi l’attractivité des recettes ou encore la facilité à consommer les plats. Ainsi, la sauce ou la vinaigrette pourrait être servie à la discrétion des enfants. Un gratin de chou-fleur rencontrera plus de succès que le chou-fleur vapeur. Une pomme déjà épluchée sera davantage consommée qu’une pomme à la croque -en particulier pour les enfants de maternelle. Lutter contre le gaspillage alimentaire, c’est aussi accepter de limiter la profusion de choix ou de restreindre les composantes de 5 à 4 éléments sur les plateaux des plus jeunes. Comment ? Par exemple en intégrant le fromage dans le plat principal ou dans le dessert sous la forme d’un fromage blanc. Enfin, dernière astuce : “ Il est recommandé de prévoir le lundi des ingrédients qui, s'ils ne sont pas complètement consommés, vont pouvoir être utilisés un autre jour. Par exemple, des pommes de terre vapeur qui pourront être mixées dans le potage du lendemain”, complète Laurence Gouthière. Ou proposer des jus de fruits, le vendredi, réalisés à partir de fruits qui commencent à s’abîmer.

    plusieurs variétés de saladesRepenser son mode de gestion

    « Tout ne se joue pas côté convives. Près de 50 % des pertes proviennent de la préparation et de la distribution. Typiquement, c’est ce qui va rester en vitrine, comme les petits ramequins de fromage blanc qu’on ne pourra pas redistribuer le lendemain. D’où l’importance de bien anticiper les effectifs : il reste encore des collectivités qui ne demandent pas de réserver les repas. Résultat : elles préparent des quantités trop conséquentes », explique Laurence Gouthière. D’autant plus que certains établissements continuent de proposer 100% de choix en fin de service, ce qui génère nécessairement du gaspillage. Alors que le bon sens est de restreindre le panel de plats sur la fin de service et d’alterner les ordres de passages des élèves d’un jour sur l’autre.

    Le mode de gestion et de distribution influe sur le gaspillage : « Nous notons par exemple beaucoup moins de gaspillage quand les plats sont cuisinés sur place. Tout simplement, parce qu’il est plus facile d’être réactif et d’ajuster les quantités. Alors que dans une cuisine centrale, avec des étapes de refroidissement et de réchauffage, ce n’est pas aussi simple », constate Laurence Gouthière. Pour les établissements et collectivités qui ont opté pour une gestion concédée, il est essentiel de prévoir dans les contrats une clause pour réajuster régulièrement les grammages dans un objectif de lutte contre le gaspillage alimentaire. Dans le cas contraire, les prestataires peuvent se retrouver enfermés dans des contraintes peu propices au changement.

    Sensibiliser les équipes comme les convives

    « Une action que je trouve toute simple en scolaire, et qui marche, c'est le principe de petite faim/grande faim. Au début du repas, l’élève choisit un jeton “Faim de loup” ou “Appétit de moineau”. Il le pose sur son plateau et il va être servi en fonction. C’est tout simple et ça sensibilise les équipes de cuisine comme les élèves », raconte Laurence Gouthière.

    Dans tous les cas, pour lutter contre le gaspillage alimentaire, tous doivent se mobiliser : 

    • Exercices de tri des déchets et de pesées avec les élèves, en les incitant à transformer ce poids en équivalent nombre de repas pour que ce soit plus parlant. 
    • Rencontre avec le chef cuisinier et les équipes de restauration pour installer des liens de confiance. Plus cette relation de respect est forte, plus les enfants auront envie de goûter et le sentiment que c’est important de finir son assiette pour ne pas blesser ceux qui se sont donné de la peine pour leur préparer leur repas. 
    • Intervention d’un producteur de fromages ou d’un cultivateur de pommes pour redonner du sens et de la valeur aux produits, et ainsi être moins tentés de les jeter.  
    • Affichage pédagogique sur les aliments qui composent un plat pour aider les élèves à mieux discerner leurs préférences et à se servir en fonction. 

    Les idées et actions simples ne manquent pas pour faire prendre conscience que chaque geste compte, découvrir ses goûts, l'évolution de son appétit d'un jour à l'autre et la cohérence entre ce qu'on va se servir et ce qu'on va consommer. 

     

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